Discours de Excellence Monsieur
Agbéyomé Messan Kodjo
à la Conference internationale sur le Financement du Developpement Monterrey, Mexico
- Monsieur le Président,
C 'est avec un insigne honneur que je prends devant cette auguste Assemblée la parole au nom du Président de la Republique Togolaise Son Excellence GNASSINGBE EYADEMA, qui aurait bien aimé être des vôtres mais empêché, a la dernière minute par ses lourdes charges d' Etat, il m' a dépèché ici à Monterrey, pour vous exprimer sa solidarité et sa vision du problème qui pendant notre séjour dans cette belle regiôn de notre planète sera au coeur de nos débats: la pauvreté dont le développement semble défier l' intelligence des hommes et constitue pour nous tous un grave sujet de préoccupation. Après la déclaration du Sommet du Millénaire en septembre 2000 et la troisième Conférence des Nations-Unies sur les Pays les moins avancés en mai 2001 qui consacrèrent la détermination de la Communauté internationale à lutter contre la pauvreté, la présente Conférence internationale sur le finanacement du développement nous donne la preuve que l' indifférence et l' égoïsme ne sauraient avoir droit de cité dans ce monde marqué par de profondes inégalités. C' est pourquoi, il m'est particulièrement agréable de saluer l'action des Nations-Unies et de son Sécrétaire Général, Monsieur Kofi Anan, de les féliciter pour le combat qu'il mènent en faveur de la paix et de la réduction de la pauvreté dans le monde. Monsieur le Président, Au nom de la délégation togolaise, je tiens à vous présenter à vous même et aux autres membres du Bureau mes plus vives félicitations pour votre brillante élection. Nous sommes persuadés que vos expériences aidant, la Conférence aboutira à des résultats prometteurs. Mesdames, Messieurs, Notre époque ressemble à s'y méprendre à ces moments de rupture dont l'humainté a déjà été témoin et dont la révolution copernicienne fut l' une des expressions les plus singuliéres. Mais les progrès d'aujourd' hui ouvrent des temps d'incertitude tant les changements sont rapides avec comme particularité l'accroissement de la pauvreté dans le monde. C'est pourquoi, la lutte contre la pauvreté ne saurait masquer les responsabilités de la communauté internationale ni occulter les efforts communs que nous devons mener dans ce domaine. Depuis le début des années 50, la richesse de la planète a été mulitpliée par six (6) alors que le revenu moyen de la majeure partie du monde est en pleine régression de même que l'espérance de vie. Les trois personnes les plus riches du monde ont une fortune supérieure au PIB total des 48 pays les plus pauvres. Le patrimoine des quinze individus les plus fortunés dépasse le PIB de toute l'Afrique subsaharienne. Enfin les avoirs des 84 personnes les plus riches surpassent le PIB de la Chine forte de 1,2 milliard d' habitants. Il n'est pas tolérable que les pays du tiers monde s'enfoncent dans le marasme à cause du poids leur dette extérieure que est passée de 1300 milliards de dollars en 1992 à 2100 milliards fin 2000 soit une progression de 62% et du paiement des intérêts qui s'est accru de 95% passant de 176 millards de dollars à 343 milliards. De telles difficultés nous éloignent de la théorie de « l' allocation optimale des ressources » chère aux tenants du libéralisme. Mesdames, Messieurs, Au cours de ces dernières annés, le bilan économique de l'Afrique témoigne d'une croissance faible, effacée en grande partie par la pression démographique. Si la croissance du PUB réel s'est située autour de 3 à 4% par an pour la période 1995-2001, ces taux rappportés au nombre d'habitants sont inférieurs à 1%. Cette observation varie naturellement suivant les zones géographiques et plus encore au niveau des pays. Par ailleurs, le continent africain ne représente aujourd'hui que 1% du commerce mondial, ce qui a notamment pour conséquence d' empêcher nos pays de financer leur importations, et de bénéficier des transferts de technologies qui y sont associés ainsi que des progrès de productivité qu'ils peuvent en escompter. A l'aube du 21è siècle, près de la moitié de la population du continent vit au-dessous du seuil de pauvreté fixé à moins d' un dollar par jour. De même l'espérance de vie et le taux d'alphabétisation qui sont respectivement de 52 ans et de 44 pour cent, sont les plus faibles au monde, alors que les taux de mortalité infantile et juvénile sont les plus élevés. La propagation du VIH/SIDA et la persistance du paludisme risquent d'annihiler les progrès économiques et sociaux obtenus au cours des dernières années. C'est dire que promouvoir la croissance soit un taux de plus de 7% du PIB par an pendant les quinze (15) prochaines années, et réduire la pauvreté doivent demeurer des priorités de développement en Afrique. C'est dans cet esprit que les Chefs d'Etat et de Gouvernement ont adopté à Lusaka en novembre 2001 for du 37e Sommet de l' OUA un ensemble de nouvelles stratégies de développement et de programmes d' action à l' échelle du continent connus sous le nom de Nouvelle Initiative Africaine ou NEPAD qui insiste sur un nouveau partenariat mondial pour le développement de l'Afrique. Monsieur le Président,
La présente Conférence doit permettre à l'Afrique de renforcer son partenariat avec les institutions financières aussi bien bilatérales que multilatérales, la société civile et la Communauté des ONG. Mais à ce stade de mon propos, permettez-moi de rappeler quelques principes et méthodes qui doivent sous-tendre le financement du développement, des principes intangibles et universellement acceptés, c'est à dire reconnus par la communauté internationale comme le grand livre de moralité universelle qui doit gouverner les rapports entre les Nations. Le premier de ces principes, c'est le règlement des différends par voie de négociation qui doit contribuer à l'instauration d'une paix durable sans laquelle aucun développement n'est possible. Il faut prévenir les conflits par des actions convergentes sur les causes d'instabilité dans le monde, apaiser les tensions internes par un développement accéleré, assurer la protection des droits de l' homme. Le deuxième principe, c'est l' application de la double norme de moralité dans les relations internationales qui privilégie la diversité des situations économiques, sociales et culturelles de notre monde, et le refus de la pensée unique. A cet égard, il importe de dépasser le « Consensus de Washington » qui contribue parfois à affaiblir les centres de décision économique dans certains de nos pays, à diminuer l'efficacité des projets et des programmes et à favoriser implicitement le gaspillage des ressources. Il est donc urgent d' instaurer un véritable dialogue entre les politiques de développement pour mieux assurer la compatibilité des intérêts de tous. C'est dire qu'il faut rechercher la justice et l'équité dans les opérations de partenariat ; justice pour les pays les plus fragiles, équité et juste récompense pour ceux qui se privent de leur épargne pour contribuer à la création de richesses chez les autres. Enfin une plus grande solidarité devrait réunir les investisseurs étrangers et les pays hôtes dans une vision à long terme du développement afin d' offrir à nos pays la possibilité de moderniser las secteurs qui demandent des investissements relativement élevés et dont le délai d'amortissement est généralement plus long. Nous pensons en particulier au secteur des infrastuctures de communication et des infrastuctures économiques. Pour clore ce chapitre des principes, nous ne saurions assez insister l' exigence de loyauté qui doit présider aux échanges internationaux car bon nombre de pays développés se livrent vis à vis des pays en développement a une concurrence déloyale en utilisant les barrières non tarifaires, promues désormais comme la face cachée du désarmement douanier, dans le but de fermer leur marché à des produits concurrents. Mesdames, Messieurs, Loyauté envers tous, solidatirté envers les plus faibles, recherche du dialogue, de la justice et de l'équité, promotion de la paix, refus de la pensée unique et de l'ethnocentrisme réducteur, tels doivent être les principes sur lesquels nous devons fonder le concensus de Monterrey- ou la déclaration comme diraient certains- afin d' assurer l'efficacité de tous les investissements et de promouvoir un développement durable dans les pays en développement. Outre ces principes, la mobilisation de la communauté internationale pour le financement du développement mérite d' être rénovée dans ses méthodes ou tout au moins améliorée si nous voulons rompre avec les errements du passé et coller à l' esprit de la Déclaration du Millénaire qui appelle à plus de solidarité et d' efficacité. Dans cette perspective, nous devons remettre à l' honneur le
partenariat, gage d'efficacité et de consolidation du changement.
L'efficacité du partenariat suppose que les pays en développement et particulièrement les pays africains expriment clairement leur volonté de réformes qui permettent d'offrir aux investisseurs étrangers les meilleures conditions de profit. Il ne s'agit pas de réformes imposées de l' exterieur mais d' une démarche consciente et régulière de changement qui passe, entre autres, par la stabilité du cadre macro-économique, la volonté de donner des garanties aux investisseurs étrangers par l' amélioration de l'environnement juridique et judiciaire, l'allègement et la simplification des règles qui président au développement des affaires, l'allègement de la fiscalitpe pour encourager l' effort, la bonne gouvernance, et la lutte contre la corruption. Enfin l'ampleur des besoins du continent africain requiert la rationalisation des groupements que nous avons crées depuis quatre décennies et auxquels le nouveau partenariat pour le développement vient de donner un souffle nouveau. A l' heure du développement de la régionalisation, l' Afirque a plus que jamais besoin d'optimiser ses efforts afin de rentabiliser les investissements industriels et d'infrastructures permettant ainsi de réaliser des économies d' échelle mais aussi de rendre plus homogènes nos espaces économiques. A cet effet le Gouvernement togolais lance un appel à toute la communauté internationale et particulièrement aux pays riches en vue de l'accroissement des investissements directs, des investissements de portefeuille et de l'aide Aide Publique au Développement en faveur de l'Afrique. Cette aide ne cesse de diminuer depuis cette dernière décennie et il est temps que le niveau de 0,7% .-'a PNB fixé par les Nations-Unies soit rapidement atteint à l'horizon 2015. Concernant la dette, une annulation pure et simple ne saurait heurter notre conscience de partenaires loyaux car sa persistance et son poids sur nos économies résultent en partie de l'appréciation du dollar et de la dévalutaion de certaines monnaies. Bien des voix autorisées dans les pays développés viennent ces jour ci de nous conforter dans cette conviction et nous voudrions nous en féliciter tout particulièrement. Il est également temps que la communauté internationale se penche sur la possibilité de donner corps à une taxe internationale sur les transactions financières mondiales, évaluée à 750 milliards de dollars par an par la CNUCED et qui représentent plus du tiers de la dette des pays en développement en l' an 2000. L'allégement auquel peuvent s'attendre nos pays dans le cadre de l'initiative PPTE demeure encore complexe et les résultats mitigés. Mesdames, Messieurs,
Je m'en voudrais de ne pas vous dire en quelques mots les efforts que déploie le Togo dans le cadre de la réduction de la pauvreté. La crise socio-politique des années 90 et la suspension de la coopération financière avec notre pays ont contribué à l'accroissement de la pauvreté et à la diminution de la capacité d' intervention de l'Etat. Pour faire face au phénomène de paupéristaion croissante de notre population, le Togo avec l'appui de ses partenaires en développement, élabore activement son Document de Stratégie de Réduction de Pauvreté (DSRP). Les éléments sur lesquels se focalise l' action du Gouvernement porte sur l' amélioration du cadre macro-économique, la mise en oeuvre des réformes structurelles permettant de prendre en compte les besoins des plus pauvres, la promotion de la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, la promotion de l' initiative privée, la création de petites unités de production de services, le soutien au réseau associatif pour permettre aux pauvres de se prendre en charge, la promotion de la décentralisation, la lutte contre les grandes endémies comme le VIII/SIDA, l' approvisionnement en eau potable, la promotion d'une politique d'éducation donnant aux jeunes les moyens de se réaliser, etc. A cet égard, je voudrais lancer un appel à la communauté internationale afin qu'elle soutienne davantage le Togo dans ses efforts de réduction de la pauvreté. Mesdames, Messieurs, Telle est la vision partagée du financement du développement qu'il faudra privilégier si nous voulons accélérer le développement des pays faibles notamment les pays pauvres et réduire la pauvreté de moitié d' ici 2015 conformément à la déclaration du Millénaire. Il s'agit d' une ambition collective et d' un acte de solidarité que nous pouvons réussir à condition de nous départir de nos égoïsmes. Par ces temps d'incertitude soumis à la rapidité des progrès technologiques, nous devons nous dépasser dans une vision unitaire de la planète qui ne saurait souffrir ni de gaspillage, ni de frustration, ni de pauvreté, ni d'exclusion, ni de misère afin d' aider à l' avènement de plus de solidarité et à l'instauration d'une paix durable entre les hommes et les nations du monde entier. Je vous remercie.
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