Le Cameroun célèbre le 50e anniversaire de son indépendance

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Le Cameroun célèbre le 50e anniversaire de son indépendance

UN Africa Renewal / Ernest Harsch
School children march in celebrations marking Cameroon’s 50th anniversaryDes écoliers participent au défilé marquant le 50e anniversaire de l’indépendance du Cameroun.
Photo: Afrique Renouveau ONU / Ernest Harsch

Le 20 mai dernier, les ronds-points et les rues du centre de Yaoundé, la capitale du Cameroun, étaient décorés de banderoles, d’arrangements de fleurs et de lumières multicolores à l’occasion du défilé civil et militaire marquant les 50 ans de l’accession du pays à la souveraineté. “Le Cameroun est libre et indépendant,” proclamait une grande banderole brandie par lors du défilé ; alors que d’autres affichaient : “Unité et solidarité,” “Vive l’intégration nationale,” ou encore : “Développement des Camerounaises”.

La même fierté était présente parmi les populations des quartiers défavorisés lors des nombreuses manifestations qui ont précédé les festivités. Cependant, confronté au chômage et à la flambée des prix des produits essentiels, beaucoup étaient davantage préoccupés par les questions de survie quotidienne. Et ainsi que l’a rappelé aux Camerounais le Président Paul Biya dans son discours à la nation inaugurant les célébrations de ce 50e anniversaire, “il faut bien reconnaître que la partie la plus vulnérable de notre population, surtout dans les zones rurales, n’a pas vu son sort s’améliorer considérablement” depuis l’indépendance.

Le Cameroun n’a pas été le seul pays à obtenir son indépendance il y a 50 ans. Seize autres pays africains – en majorité d’ex-colonies françaises, mais aussi le Nigeria, la Somalie et la présente République démocratique du Congo – ont accédé cette année-là à la souveraineté. Certains dirigeants de ces pays s’étaient d’ailleurs joints aux dignitaires locaux dans les tribunes officielles pour assister au défilé du 20 mai et à l’ouverture d’une conférence internationale de deux jours organisée en prélude aux célébrations. Parmi ces personnalités figuraient les présidents de l’Algérie, du Burkina Faso, de la République centrafricaine, du Tchad, de la République du Congo, de la Côte d’Ivoire, de la République démocratique du Congo, de la Guinée équatoriale, du Gabon et de São Tomé and Príncipe. Le puissant voisin Nigerian était représenté à la fois par son président récemment élu, Goodluck Jonathan, et par les anciens présidents Olusegun Obasanjo et Yakubu Gowon.

Paix régionale, tensions nationales

La présence des plus hautes figures politiques du Nigeria à Yaoundé était un signe de l’amélioration récente des relations entre les deux pays. En 1981, le contentieux entre les deux voisins au sujet de la péninsule de Bakassi avait failli dégénérer en un conflit armé. Les affrontements qui avaient suivi dans les années 1990 avaient mené à l’occupation du territoire contesté. Malgré l’arbitrage de la Cour internationale de justice qui avait attribué Bakassi au Cameroun en 2002, il fallut encore plusieurs années et la médiation de l’ONU pour que le Nigeria se retire de la péninsule en 2008. La résolution pacifique de ce différent frontalier est un symbole fort sur un continent marqué par des guerres.

À la différence de la plupart de ses voisins, le Cameroun a connu une paix relative – du moins après les années sanglantes qui ont marqué sa naissance en tant qu’État indépendant. Avant la fin de la colonisation française, un mouvement insurrectionnel radical pour l’indépendance mené par Ruben Um Nyobé mena une lutte tenace à la fin des années 1950 avant d’être militairement vaincu. Le Président Ahmadou Ahidjo, parvenu au pouvoir avec l’aide de la France, continua les opérations militaires contre ce qui restait des forces insurgées jusque dans les années 1970. Cette expérience renforça les tendances autoritaires du gouvernement qui procéda également en 1972 à la centralisation de l’État en mettant fin au système fédéral qui avait été mis en place en 1961, au lendemain de l’accession à l’indépendance d’une partie du pays alors colonisée par la Grande-bretagne.

Cette page controversée de son histoire marque aujourd’hui encore le débat politique camerounais. Au cours du défilé du 20 mai, des membres d’un parti politique se réclamant des indépendantistes se sont vus interdire de porter des pancartes avec les portraits d’Um Nyobé et d’autres dirigeants rebelles de l’époque. Les militants d’un autre parti, le plus important parti d’opposition au parlement, ont déroulé des banderoles demandant un retour au fédéralisme et dénonçant un parti pris de la commission électoral en faveur du parti du Président Biya.

Un certain nombre de Camerounais — partisans de l’opposition, journalistes indépendants, universitaires et même certains membres du parti au pouvoir — expriment ouvertement leur déception devant l’apparente stagnation politique du pays, malgré le retour au multipartisme du début des années 1990. Le Président Biya est au pouvoir depuis 28 ans, suite à la démission en 1982 de M. Ahidjo, pour raisons de santé. La constitution a été amendée en 2008 pour permettre au président sortant âgé de 77 ans de se représenter à la présidentielle de 2011.

Les hauts et les bas de l’économie

Les partisans du gouvernement expliquent que cette stabilité politique prolongée a été un facteur important dans les bons résultats économiques et sociaux obtenus par le pays. Avec une population de 20 millions d’habitants, le Cameroun est riche en ressources forestières et en cours d’eau, exploite des gisements de pétrole non négligeables ainsi que d’autres ressources minières et possède un secteur manufacturier diversifié. Son Produit national brut par habitant le place dans les dix premiers pays d’Afrique subsaharienne.

Mais à l’instar de certains de ses voisins, le pays reste vulnérable aux chocs économiques extérieurs. Parmi ces chocs, ainsi que le notait le Président Paul Biya, on compte la détérioration des termes de l’échange, le ralentissement de la croissance en Europe et en Asie (régions qui absorbent une grande partie des exportations camerounaises) et des fluctuations imprévisibles du prix du pétrole et d’autres matières premières. “Tous ces phénomènes ont eu des conséquences négatives pour notre économie,” affirme-t-il.

Au cours des années récentes, le taux de croissance économique du Cameroun a généralement été inférieur à la moyenne subsaharienne. Près de 58 % de la population gagne moins de 2 dollars par jour et un tiers moins de 1,25 dollar. En 2008, une hausse brutale du prix des aliments et des produits pétroliers a provoqué de graves émeutes à Yaoundé, à Douala et dans plus de vingt autres villes.

Selon de nombreux analystes, ces problèmes sont aggravés par le haut niveau des inégalités de revenu et par une corruption omniprésente. En dépit de l’arrestation de dizaines de fonctionnaires, et même de plusieurs ministres, accusés de détournement de fonds et de fraude dans le cadre d’une action anti-corruption baptisée Opération épervier, le Cameroun rest classé par Transparency international et par d’autres organisations  parmi les pays les plus corrompus d’Afrique.

Ceci dit, le Cameroun a fortement investi dans l’éducation. Après une baisse marquée dans les années 1990, provoquée par des restrictions budgétaires, les crédits consacrés au secteur par le gouvernement ont commencé à augmenter à partir de 2000 et ont permis de construire des milliers de nouvelles salles de classe, d’augmenter les salaires des enseignants et d’abolir les droits d’inscription pour les élèves du primaire. Les taux de scolarisation du pays sont comparables à la moyenne pour les pays d’Afrique subsaharienne et son taux d’alphabétisation légèrement supérieur. Le Cameroun compte aujourd’hui 190 000 étudiants inscrits dans ses sept universités, par comparaison avec juste 1000 étudiants en 1961.

Tout en Espérant que ces jeunes camerounais parviendront éventuellement à obtenir un emploi, le gouvernement a récemment lancé une stratégie “croissance et emploi” pour les dix prochaines années. Son but est d’accroître les investissements dans le réseau routier, le réseau de distribution électrique et d’autres infrastructures, de moderniser des industries vieillissantes et de renforcer les secteurs de la santé et de l’éducation et la formation professionnelle.

– Afrique Renouveau en ligne