STATUT DU TRIBUNAL D'APPEL DES NATIONS UNIES

Ce texte est informel et s'inspire des résolutions émises par l'Assemblée générale. Seules les résolutions pertinentes de l'Assemblée générale dans les langues officielles reflètent la loi.

Tel qu'adopté par l'Assemblée générale dans sa résolution 63/253 le 24 décembre 2008, amendé par la résolution 66/237 adoptée le 24 décembre 2011, amendé par la résolution 69/203 adoptée le 18 décembre 2014, amendé par la résolution 70/112 adoptée le 14 décembre 2015 et amendé par la résolution 71/266 adoptée le 23 décembre 2016.

Article 1

Il est créé un Tribunal d’appel des Nations Unies, deuxième instance du systèmeformel d’administration de la justice à double degré.

Article 2

Le Tribunal d’appel est compétent pour connaître des appels formés contre lesjugements du Tribunal du contentieux administratif des Nations Unies, motif pris de ce que celui-ci :

(a) Aurait outrepassé sa compétence ;

(b) N’aurait pas exercé la compétence dont il est investi ;

(c) Aurait commis une erreur sur un point de droit ;

(d) Aurait commis, dans la procédure, une erreur propre à influencer le jugement ; ou

(e) Aurait commis, sur un point de fait, une erreur ayant entraîné un jugement manifestement déraisonnable.

2. Appel peut être interjeté par l’une ou l’autre partie (à savoir le requérant, ou, s’il est incapable ou décédé, ses ayants droit, et le défendeur) de tout jugement du Tribunaldu contentieux administratif.

3. Le Tribunal d’appel peut confirmer, infirmer, modifier ou renvoyer le jugement du Tribunal du contentieux administratif. Il peut également rendre toute ordonnance utile ou nécessaire à l’exercice de sa compétence et compatible avec le présent Statut.

4. Lorsque l’appel est fondé sur l’alinéa e du paragraphe 1 du présent article, le Tribunal d’appel peut :

(a) Confirmer, infirmer ou modifier les constatations de fait du Tribunal du contentieux administratif si le dossier de l’affaire contient des éléments de preuve substantiels le justifiant ; ou

(b) Renvoyer l’affaire au Tribunal du contentieux administratif pour des constatations de fait additionnelles, sous réserve du paragraphe 5 du présent article, s’il considère que de telles constatations sont nécessaires.

5. Dans des circonstances exceptionnelles, et lorsqu’il considère qu’il est en mesure d’établir les faits au moyen de preuves documentaires, notamment de 2 dépositions écrites, le Tribunal d’appel peut recueillir de tels éléments additionnels si cela est commandé par l’intérêt de la justice et contribue au bon déroulement de l’instance et en accélère l’issue. Si tel n’est pas le cas, ou s’il considère qu’il ne peut rendre son arrêt sans auditions ou autres modes de preuve non littérale, il renvoie l’affaire au Tribunaldu contentieux administratif. Sont exclues des preuves visées dans le présent paragraphe celles qui étaient connues de l’une ou l’autre partie et auraient dû être produites devant le Tribunal du contentieux administratif.

6. Lorsqu’il renvoie une affaire au Tribunal du contentieux administratif, le Tribunal d’appel peut ordonner qu’elle soit examinée par un autre juge de ce Tribunal.

7. Aux fins du présent article, on entend par « dossier de l’affaire » tout ce qui a été versé officiellement au dossier du Tribunal du contentieux administratif, notamment les conclusions, éléments de preuve, dépositions, requêtes, exceptions et décisions ainsi que le jugement, et tous éléments de preuve reçus en application du paragraphe 5 du présent article.

8. Le Tribunal d’appel statue sur toute contestation de sa compétence.

9. Le Tribunal d’appel est compétent pour connaître des requêtes en appel de toute décision prise par le Comité permanent agissant au nom du Comité mixte de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies, alléguant l’inobservation des Statuts de la Caisse et introduites par :

(a) Tout fonctionnaire d’une organisation affiliée à la Caisse commune des pensions qui a accepté sa compétence pour les affaires concernant la Caisse ayant la qualité de participant à celle-ci aux termes de l’article 21 de ses Statuts, même si sa période de service est terminée, ainsi que toute personne ayant succédé à cause de mortaux droits dudit fonctionnaire ;

(b) Toute autre personne pouvant établir que la participation à la Caisse commune des pensions de tout fonctionnaire d’une organisation visée à l’alinéa précédent lui confère des droits en vertu des Statuts de la Caisse.

Dans ce cas, l’affaire sera éventuellement renvoyée au Comité permanent agissant au nom du Comité mixte de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies.

10. Le Tribunal d’appel est compétent pour connaître des requêtes introduites contre toute institution spécialisée reliée à l’Organisation des Nations Unies conformément aux dispositions des Articles 57 et 63 de la Charte des Nations Unies, ou contre toute autre organisation ou entité internationale créée par un traité et participant au régime commun des conditions d’emploi, lorsque l’institution, l’organisation ou l’entité concernée a conclu avec le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies un accord spécial par lequel elle accepte la compétence du Tribunal d’appel, conformément au présent Statut. Cet accord spécial stipule que l’institution, l’organisation ou l’entité concernée est liée par l’arrêt du Tribunal d’appel et tenue de verser les indemnités éventuellement accordées par celui-ci à ses fonctionnaires, et consacre notamment des dispositions à la participation de ladite institution, organisation ou entité aux mécanismes administratifs nécessaires au fonctionnement du Tribunal d’appel ainsi qu’à sa contribution aux dépenses de celui-ci. Cet accord spécial prévoit également toutes autres dispositions requises pour permettre au Tribunal d’appel de s’acquitter de ses fonctions vis-à-vis de l’institution, l’organisation ou l’entité. Un tel accord est conclu avec la seule institution, organisation ou entité qui aurait institué une instance du premier degré statuant sur dossier par voie de décisions écrites et motivées. En pareil cas, tout renvoi serait à cette première instance.

Article 3

(Modifié par la résolution 69/203 et la résolution 70/112)

1. Le Tribunal d’appel se compose de sept juges.

2. Les juges sont nommés par l’Assemblée générale sur la recommandation du Conseil de justice interne conformément à la résolution 62/228 de l’Assemblée. Ils sont tous de nationalité différente et sont nommés eu égard aux principes de la répartition géographique et de l’équilibre entre les effectifs des deux sexes.

3. Pour pouvoir être nommé juge, il faut :

(a) Jouir de la plus haute considération morale et être impartial ; et

(b) Justifier au total d’au moins 15 années d’expérience judiciaire en droit administratif, en droit du travail ou d’une expérience équivalente acquise dans une ou plusieurs juridictions nationales ou internationales. Une expérience universitaire dans un domaine du droit intéressant le Tribunal, dès lors qu’elle est complétée d’une expérience pratique de l’arbitrage ou d’une discipline équivalente, peut être prise en considération et compter pour 5 des 15 années d’expérience ;

(c) Maîtriser au moins l’une des langues de travail du Tribunal d’appel, tant à l’oral qu’à l’écrit.

4. Les juges sont nommés pour un mandat non renouvelable de sept ans. À titre transitoire, trois des premiers juges, désignés par tirage au sort, sont nommés pour un mandat de trois ans à l’issue duquel ils peuvent à nouveau être nommés au Tribunald’appel pour un mandat non renouvelable de sept ans. Tout juge ou ancien juge duTribunal du contentieux administratif ne peut siéger au Tribunal d’appel.

5. Tout juge nommé pour remplacer un juge qui n’a pas achevé son mandat ne l’est que pour le reste de ce mandat; il peut être nommé à nouveau pour un mandat non renouvelable de sept ans, à condition que le reste du mandat de son prédécesseur ait été inférieur à trois ans.

6. Un juge du Tribunal d’appel ne peut être nommé à un poste non judiciaire dans le système des Nations Unies pendant cinq ans après avoir cessé ses fonctions.

7. Le Tribunal d’appel élit un président et deux vice-présidents.

8. Les juges du Tribunal d’appel siègent à titre personnel et en toute indépendance.

9. Tout juge du Tribunal d’appel qui a, ou paraît avoir, des intérêts en conflit dans une affaire doit se récuser. Lorsqu’une partie demande la récusation d’un juge, le Président du Tribunal d’appel décide.

10. Les juges du Tribunal d’appel ne sont révocables par l’Assemblée générale qu’en cas de faute ou d’incapacité.

11. Les juges du Tribunal d’appel peuvent démissionner par voie de notification adressée à l’Assemblée générale par l’intermédiaire du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. La démission prend effet à la date de la notification, à moins que celle-ci n’indique une date postérieure.

12. Les juges du Tribunal d’appel n’ont pas la qualité de fonctionnaire du Secrétariat de l’Organisation des Nations Unies au sens de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations Unies.

Article 4

(Modifié par la résolution 71/266)

1. Le Tribunal d’appel exerce ses fonctions à New York. Néanmoins, il peut décider de siéger à Genève ou à Nairobi si les affaires inscrites au rôle le justifient.

2. Le Tribunal d’appel se réunit en session ordinaire aux dates fixées par son règlement de procédure, à condition que son Président juge le nombre d’affaires suffisant pour justifier la tenue d’une session.

3. Le Président peut convoquer des sessions extraordinaires, en fonction de l’état du rôle du Tribunal d’appel.

4. Le Président est habilité, entre autres, à s’assurer que les décisions sont rendues en toute célérité.

Article 5

1. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies prend les mesures administratives nécessaires au fonctionnement du Tribunal d’appel, y compris toutes dispositions relatives aux frais de voyage et frais connexes des personnes dont le Tribunal d’appel juge la comparution nécessaire, et aux frais de voyage des juges se rendant à Genève ou à Nairobi pour y siéger.

2. Établi à New York, le Greffe du Tribunal d’appel comprend un greffier et le personnel nécessaire.

3. Les dépenses du Tribunal d’appel sont prises en charge par l’Organisation des Nations Unies.

4. Les indemnités octroyées par le Tribunal d’appel sont versées par le Secrétariat de l’Organisation ou le fonds ou programme des Nations Unies doté d’une administration distincte selon le cas et, s’il y a lieu, par l’institution spécialisée, l’organisation ou l’entité ayant accepté la compétence du Tribunal.

Article 6

1. Sous réserve des dispositions du présent Statut, le Tribunal d’appel arrête son règlement de procédure, qui est soumis à l’approbation de l’Assemblée générale.

2. Le règlement de procédure du Tribunal d’appel organise :

(a) L’élection du Président et des Vice-Présidents ;

(b) La composition du Tribunal d’appel réuni en session ;

(c) L’organisation des travaux ;

(d) La présentation des écritures et les procédures à suivre à cet égard ;

(e) Les règles de confidentialité et l’irrecevabilité des déclarations verbales ou écrites faites pendant une médiation ;

(f) L’intervention de personnes non parties à l’instance dont les droits sont susceptibles d’avoir été affectés par le jugement du Tribunal du contentieux administratif et donc d’être affectés par l’arrêt du Tribunal d’appel ;

(g) Le dépôt de mémoires en qualité d’amicus curiæ avec l’autorisation du Tribunal d’appel ;

(h) La procédure orale ;

(i) La publication des arrêts ;

(j) Les fonctions du Greffe ;

(k) La récusation des juges ;

(l) Toute autre question relative au fonctionnement du Tribunal d’appel.

Article 7

(Modifié par la résolution 66/237 et la résolution 69/203)

1. Un appel est recevable :

(a) Si le Tribunal d’appel a compétence pour en connaître en vertu du paragraphe 1 de l’article 2 du présent Statut ;

(b) Si le requérant est habilité à interjeter appel en vertu du paragraphe 2 de l’article 2 du présent Statut ; et

(c) S’il est formé dans les 60 jours calendaires de la réception du jugement du Tribunal du contentieux administratif ou dans les 30 jours de la réception d’une ordonnance interlocutoire, si le Tribunal d’appel a décidé de suspendre ou de supprimer ce délai en vertu du paragraphe 3 du présent article, dans le délai qu’il a indiqué.

2. Pour être recevable, toute requête alléguant l’inobservation des Statuts de la Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies du fait d’une décision du Comité mixte de la Caisse doit être introduite dans les 90 jours calendaires de la réception de cette décision.

3. Le Tribunal d’appel peut décider par écrit, à la demande écrite du requérant, de suspendre ou supprimer les délais pour une période limitée et seulement dans des cas exceptionnels. Le Tribunal d’appel ne peut ni suspendre ni supprimer les délais du contrôle hiérarchique.

4. Nonobstant le paragraphe 3 du présent article, un appel n’est pas recevable s’il est formé plus d’un an après que le jugement du Tribunal du contentieux administratif qu’il vise a été rendu.

5. L’appel opère suspension de l’exécution du jugement ou de l’ordonnance contestés.

6. L’acte d’appel et les autres pièces de procédure sont présentés dans l’une des langues officielles de l’Organisation des Nations Unies.

Article 8

1. Le Tribunal d’appel peut ordonner la production de documents et autres éléments de preuve qu’il juge nécessaires, sous réserve des dispositions de l’article 2 du présent Statut.

2. Le Tribunal d’appel décide si la présence de l’appelant ou de toute autre personne est requise à l’audience et, le cas échéant, par quels moyens satisfaire à cette exigence.

3. Les juges saisis d’une affaire décident s’il y a lieu de tenir une procédure orale.

4. Les audiences du Tribunal d’appel sont publiques à moins qu’il ne décide, d’office ou à la demande d’une partie, d’ordonner le huis clos en raison de circonstances exceptionnelles.

Article 9

(Modifié par la résolution 69/203)

1. Le Tribunal d’appel ne peut ordonner que l’une des deux mesures suivantes, ou les deux dites mesures :

(a) L’annulation de la décision administrative contestée ou l’exécution de l’obligation invoquée, étant entendu que, si la décision administrative contestée portesur une nomination, une promotion ou un licenciement, le Tribunal fixe également le montant de l’indemnité que le défendeur peut choisir de verser en lieu et place de l’annulation de la décision administrative contestée ou de l’exécution de l’obligation imposée, sous réserve des dispositions de l’alinéa b du présent paragraphe ;

(b) Le versement d’une indemnité pour préjudice avéré qui ne peut normalement être supérieure à deux années de traitement de base net du requérant. Le Tribunal d’appel peut toutefois, dans des circonstances exceptionnelles et par décision motivée, ordonner le versement d’une indemnité pour préjudice avéré plus élevée.

2. Quand le Tribunal d’appel constate qu’une partie a manifestement abusé de la procédure d’appel, il peut la condamner aux dépens.

3. Le Tribunal d’appel ne peut octroyer de dommages-intérêts exemplaires ou punitifs.

4. Le Tribunal d’appel peut, en tout état de cause, ordonner une mesure conservatoire au bénéfice temporaire de l’une ou l’autre partie pour empêcher un préjudice irréparable et pour tenir compte du jugement du Tribunal du contentieux administratif.

5. Le Tribunal d’appel peut déférer une affaire au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies ou au chef de secrétariat du fonds ou programme des Nations Unies doté d’une administration distincte en cause aux fins d’action récursoire éventuelle.

Article 10

1. Les affaires dont le Tribunal d’appel est saisi sont normalement examinées par un collège de trois juges et les décisions sont prises à la majorité des voix.

2. Lorsque le Président ou deux juges saisis de telle espèce considèrent que celle-ci soulève un point de droit important, ils peuvent, à tout moment avant de rendre leur arrêt, renvoyer l’affaire au Tribunal d’appel en formation plénière. Le quorum est alors de cinq juges.

3. Les arrêts du Tribunal d’appel sont rendus par écrit et motivés.

4. Le délibéré du Tribunal d’appel est confidentiel.

5. Les arrêts du Tribunal d’appel lient les parties.

6. Sous réserve des dispositions de l’article 11 du présent Statut, les arrêts du Tribunal d’appel sont définitifs et sans appel.

7. Les arrêts du Tribunal d’appel sont rédigés dans l’une des langues officielles de l’Organisation des Nations Unies, en deux originaux qui sont versés aux archives de l’Organisation.

8. Il est remis une expédition de l’arrêt du Tribunal d’appel à chaque partie à l’instance. L’expédition remise au requérant est dans la langue dans laquelle celuici a interjeté appel, à moins qu’il n’ait demandé qu’elle soit dans une autre des langues officielles de l’Organisation des Nations Unies.

9. Les arrêts du Tribunal d’appel sont publiés moyennant protection des renseignements personnels et sont disponibles au Greffe du Tribunal d’appel.

Article 11

1. Sous réserve des dispositions de l’article 2 du présent Statut, l’une ou l’autre partie peut demander au Tribunal d’appel la révision d’un arrêt en invoquant la découverte d’un fait décisif qui, au moment où l’arrêt a été rendu, était inconnu du Tribunal d’appel et de la partie qui demande la révision, étant toujours entendu que cette ignorance n’était pas due à la négligence. La demande doit être présentée dans les 30 jours calendaires de la découverte du fait et dans l’année de la date de l’arrêt.

2. Le Tribunal d’appel peut à tout moment, soit d’office soit à la demande d’une partie, rectifier les erreurs matérielles ou de calcul ou les erreurs résultant d’une inadvertance ou d’une omission.

3. L’une ou l’autre partie peut demander au Tribunal d’appel une interprétation du sens ou de la portée de l’arrêt.

4. Si l’arrêt devait être exécuté dans un certain délai et ne l’a pas été, l’une ou l’autre partie peut demander au Tribunal d’appel d’en ordonner l’exécution.

Article 12

Le présent Statut peut être modifié par décision de l’Assemblée générale.